dimanche 6 novembre 2016

Le photographe #5 : Grèce

Je passai en revue le contenu des sacs, avec la maniaquerie de chirurgien qui me caractérisait lors d'un départ en voyage. Tout était bon. Mais il était deux heures du matin. Inutile de songer à dormir, ou en tout cas, d'un sommeil naturel. Je sortis le rhum, lançai un polar sinistre déjà vu quatre fois, avec Denzel Washington en enquêteur tourmenté, et les pieds appuyés sur le sac de voyage entrouvert, me laissai absorber dans la boue délicieuse d'un sommeil aviné.


* * *

Une hôtesse me réveilla en me heurtant le genou avec le chariot des boissons. Elle avançait à vive allure, sans se laisser distraire ni émouvoir. L'Airbus vira sur une aile : la Méditerranée d'un bleu profond, lisse et uniforme comme une piscine en plastique. Les montagnes et collines de ce littoral découpé et haché, semblables d'ici à des mottes de sable mouillé. Le semis des étendues urbaines, scories ou cendres jetées sur le sol puis vaguement alignées au râteau en des contours ordonnés.

L'hôtel était propre et sans saveur. Je passai l'après-midi au téléphone et devant l'ordinateur. Le lendemain, croisant en les bousculant presque une famille de quatre qui s'imaginait débuter ici le voyage de ses rêves, je fonçai vers un taxi, qui m'emmena à la gare routière. Sept heures de trajet climatisé dans des collines poussiéreuses. Nouveau taxi, auprès de qui il fallut argumenter en ajoutant un gros supplément. Avec celui-ci, un jeune taciturne qui se rongeait les ongles et me surveillait du coin de l’œil, je fis encore une grosse heure de route, tantôt correcte, tantôt craquelée comme aux portes du désert.

La Mazda gravit un raidillon, prit un virage sec en descente, et là je le vis...

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