samedi 16 août 2014

Atterrissage, autre monde -
Au-delà des nuages, extraits #4


"L'impression de paix retrouvée était délicieuse. [...] Il aurait presque pu imaginer que l'homme assis à côté de lui était un vieil ami avec qui il s'apprêtait à aller boire une bière."


Un lieu commun de la littérature de voyage est bien entendu la description du sentiment de dépaysement. Sentiment sans lequel rien de tout cela n'aurait grand intérêt... Il existe à mon avis des centaines de façons de l'exprimer : perte de repères, sensation "d'étrangeté familière", impression de vivre un rêve éveillé, inexplicable déjà vu, etc.

Cette sensation parfois énorme, grisante, enivrante, de baigner dans un flot bouillonnant de sensations inconnues, où l'on se laisse noyer avec plaisir.

>>> Chapitre 3, nos voyageurs atterrissent à Caracas, embarquent dans un taxi vers leur hôtel. Résumé, dans les yeux de Gabriel, l'interprète.

"Entre la sortie de l'aéroport et leur chambre d'hôtel, une succession rapide de sensations et d'images fugaces les martelèrent, comme les flashs d'un stroboscope : lumière aveuglante et klaxons sur le trottoir de l'aéroport. Langue de chaleur humide qui les enveloppe. Air chargé des fragrances riches et sales des villes des tropiques. Carrosserie blanche avec bandes à damier jaune et noir des deux taxis qui s'arrêtent. Démarrage brutal. Air conditionné trop froid. Véhicules qui slaloment en se collant de près. Visages aperçus à travers les vitres de l'autobus que l'on dépasse. Impression d'être dévisagé, de ne plus être anonyme, en devenant, ici, un étranger. Concentration difficile, fatigue, saturation des sens. Panneaux publicitaires immenses. Nuque bien rasée et trempée de sueur du chauffeur, voiture qui donne l'impression de ne jamais cesser d'accélérer. Palmiers surgissant entre deux petites maisons aux murs sales. Immeubles de béton gris sale et immeubles rutilants de verre et d'acier. Embouteillage, motos qui se faufilent, péage : vitre qui s'ouvre, brève bouffée d'air humide et chaud comme l'haleine d'un gros fauve placide. Redémarrage bruyant. Piétons en masse : hommes aux vêtements clairs, femmes en débardeur, femmes en tailleur. Gardes armés à l'entrée des magasins, lunettes de soleil et fusil à pompe. Fils électriques tendus en dépit du bon sens et se multipliant avec l'avidité d'une araignée folle. Virage serré, léger ralentissement. Maisons remplaçant les immeubles. Barreaux aux fenêtres, clôtures barbelées entourant des jardins luxuriants. Nouveaux gardes, parking souterrain, ascenseur au chuintement tranquille, réceptionniste fraîche et souriante, chambre silencieuse et confortable. Sommeil de plomb."



Quelques autres lectures, pour nourrir différemment votre envie d'horizons lointains :-)
> Ebène, de Ryszard Kapuściński
> L'usage du monde, de Nicolas Bouvier
> Petit traité sur l'immensité du monde, de Sylvain Tesson (merci Alexandre)
> Là-bas si j'y suis, de Daniel Mermet (merci cette fois à Christophe)

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